Un projet déposé sur le Bureau de l'Assemblée Nationale et enregistré sous le numéro 711 en avril 1961 proposait l'institution d'une "taxe homéopathique" de 1‰ prélevée au profit du Trésor Public sur les mouvements des comptes courants dans les banques, les CCP et dans tous les établissements financiers autorisés à tenir des comptes de capitaux pour des tiers.
Le but en était de compenser une réduction de 50% du barème de la surtaxe progressive jugée trop lourde et une réduction des taxes indirectes sur certains produits de consommation courante, notamment ceux de l'alimentation.
L'exposé des motifs soulignait les inconvénients de notre système fiscal dont l'administration n'a pas les moyens de contrôler l'application intégrale. Parmi ses défauts étaient signalés ses taux excessifs qui incitent à la fraude, souvent dernier expédient pour éviter la fermeture d'une entreprise. En 1993, diverses publications ont établi que la fraude à la TVA pouvait atteindre 40% !!
Le système proposé devait amorcer une simplification de tous les impôts directs et indirects et introduire une plus grande justice dans la répartition de l'impôt sur les citoyens.
Après étude du projet, une Commission présidée par Mr Giscard d'Estaing, alors Secrétaire d'Etat aux Finances, avait émis de nombreuses critiques, classées en quatre ordres : problèmes juridiques, bancaires, économiques et sociaux, européens. Ces critiques, alors dirimantes, avaient condamné le projet comme impraticable.
En les examinant ci-dessous, les unes après les autres, il apparaît que le contexte ayant totalement changé, aucune de ces critiques n'est aujourd'hui valable et que maintenir cette condamnation relève du refus de penser.
I - LES PROBLEMES JURIDIQUES
Critique : techniquement cette taxe représente un impôt direct "en cascade", s'apparentant aux anciennes taxes sur le chiffre d'affaires. Le problème de sa déductibilité ou de sa non déductibilité reste à examiner.
Réponse : compte - tenu de l'extrême simplification de son contrôle, de la considérable réduction des prélèvements qu'elle permettrait sur les entreprises et donc sur les prix, sa non déductibilité est non seulement acceptable mais raisonnable
Selon les calculs de la Direction Générale des Prix (voir Annexe III ) les prélèvements obligatoires qu'elle provoquerait dans les coûts, donc sur les prix, seraient réduits à 6 ou 7% au taux de 1% au lieu des 34% que supportent fort mal actuellement nos entreprises.
2. Critique : l'application de la T.M.A.F exigerait l'interdiction de l'endos et du chèque au porteur, interdiction non autorisée par les dispositions formelles des Conventions Internationales signées par la France à Genève le 19 mars 1931.
Réponse : l'interdiction de l'endos et du chèque au porteur a été décidée par la loi en avril 1979 sans soulever la moindre opposition ni sur le plan national ni sur le plan international. Elle a mis fin à des pratiques souvent douteuses facilitant l'évasion fiscale et elle a apporté une très appréciable garantie contre le vol.
Critique : L'obligation de l'utilisation des chèques favoriserait le développement des chèques sans provision.
Réponse : La mesure complémentaire qu'appellerait l'adoption de la TAMF, savoir la suppression du billet de banque, de moins en moins utilisée et devenu l'outil de toutes les fraudes et de tous les scandales, supprimerait radicalement la pratique du chèque sans provision, le délinquant perdant tout moyen d'existence.
II - LES PROBLEMES BANCAIRES
Critique : les exigences de la perception d'une taxe sur les mouvements de fonds rendraient inévitable une réforme onéreuse de la comptabilité des banques, des CCP et des Organismes financiers agréés.
Réponse: Cet argument n'a plus aucune valeur: tous les établissements financiers agréés, les banques et les CCP ont dû pour toute autre raison que l'application de la TAMF s'équiper des matériels informatisés les plus performants. L'utilisation d'ailleurs qu'ils en font suscite l'admiration.
- Critique : On peut redouter que la taxe n'incite à l'utilisation des billets ou qu'elle ne développe les compensations internes dans le cas des succursales multiples ou entre firmes appartenant à un même groupe. Il paraît possible de retenir l'hypothèse d'une contraction sensible de l'activité des banques.
Réponse : en ce qui concerne l'utilisation des billets de banque le lecteur se reportera au paragraphe 3 ci-dessus et à l'Annexe VII. Cette hypothèse d'une possible contraction de l'activité des banques correspond au
fait qu'à l'époque les paiements par chèques ne représentaient que 30% des règlements au lieu des 95% aujourd'hui...Il est certain que les entreprises, par mesure d'économie, limiteraient leurs transferts intérieurs de compte à compte lorsqu'ils ne se justifieraient pas impérieusement. Cela rendrait d'ailleurs leur comptabilité beaucoup plus lisible. Par contre, les banques et les organismes financiers agréés bénéficieraient, comme toutes les entreprises, de la réduction de 25% de leurs coûts.
En outre tous les organismes financiers agréés et les banques chargés du prélèvement de la taxe au profit du Trésor Public, rendant un service rapide et efficace à l' Etat, recevraient à ce titre un pourcentage, à définir, sur les sommes virées. Ces mesures leur procureraient une stabilité et une compétitivité maximale vis-à-vis de leurs homologues étrangers.
- Critique : La taxe entraînerait des répercussions fâcheuses pour les banques sur le plan général de la monnaie, du crédit et de l'économie.
Réponse: argument saugrenu. Le développement de l'économie est la seule garantie d'une monnaie forte et de l'expansion du crédit. Libérées des prélèvements fiscaux qui leur imposent un handicap insurmontable dans la compétition internationale, toutes nos entreprises retrouveraient les possibilités de modernisation et d'extension qu'elles n'ont plus.
Comment penser que cette activité accrue et l'obligation de paiements à travers les banques pourraient avoir pour elles "des répercussions fâcheuses?
- Critique : si la taxe n'est pas incorporée dans les prix, on assisterait à une diminution du bénéfice imposable!
Réponse : on ne voit pas comment une entreprise pourrait ne pas incorporer les taxes dans ses prix de revient et de vente, ni pourquoi cette incorporation des taxes augmenterait le bénéfice imposable. Il y a là un incroyable aveu des partisans de l'impôt sur l'impôt!
- Critique :un établissement déterminé, une banque par exemple, a des mouvements de comptes chez ses correspondants ou à la Banque de France, qui logiquement doivent échapper à l'impôt. Par contre, elle peut avoir des mouvements de ses propres comptes chez des tiers assimilables aux mouvements d'une entreprise ordinaire. La recherche des opérations imposables serait d'une extrême complexité.
Réponse : La question ne se pose plus depuis que les organismes financiers agréés et les banques en particulier, paient la TVA sur les comptes qui les assimilent à une entreprise de services (ANNEXE IX).
III - LES PROBLEMES ECONOMIQUES ET SOCIAUX
- Critique : la Commission a estimé que la nouvelle imposition se répercuterait sur les coûts dont la hausse atteindrait 0,6 à 0,8% dans le cas de la taxe à 1‰ soit de 6 à 7% pour une taxe de 1%.
Réponse :dans le cas du projet 711, la taxe sur les mouvements de fonds se superposait effectivement aux prélèvements existants. Ce n'est pas le cas dans la solution actuellement proposée, car la TAMF à 1% (débit + crédit ) permettrait la suppression totale de tous les prélèvements actuels, impôts, taxes et charges qui s'inscrivent pour 34% dans les prix de revient et donc dans les prix de vente. C'est au contraire une baisse considérable qui s'ensuivrait : 34% moins 7% en moyenne, soit un minimum de baisse de 25%. Le pouvoir d'achat en serait augmenté, ce qui mettrait fin à l'inflation par course poursuite salaires - prix, principal motif de l'agitation sociale.
- Critique : l'institution de la TAMF aboutirait à faire supporter partiellement la mesure par les catégories sociales les plus défavorisées.
Réponse : l'argument était valable en 1961: la faiblesse de la taxe alors proposée ne permettant pas la suppression radicale de tous les prélèvements sur les entreprises. Nous avons vu qu'avec la taxe de 1%, le pouvoir d'achat de toute la population donc des catégories sociales les plus défavorisées, serait amélioré de 25% sur tous les produits français. Le rendement de cette taxe permettrait en outre d'augmenter les salaires faibles de 5% dégressifs du SMIG jusqu'à 12.000 francs par mois.
IV - LES ECHANGES EUROPEENS
- Critique : La Commission admettait que la taxe ne paraissait pas se heurter aux dispositions du Traité de Rome. Toutefois, déclarait-elle, l'institution d'un prélèvement forfaitaire à l'importation "pourrait" susciter des réactions chez les partenaires.
Réponse : Les divers mouvements de devises qui ont mis à mal naguère le serpent monétaire européen n'ont pas provoqué de contestations dramatiques et nos partenaires ne sauraient nous imposer de conserver une technique fiscale suicidaire. D'ailleurs, il n'est pas aberrant de penser que l'adoption de la TMAF par nos associés européens serait rapide dans la mesure où le leur permettraient les équipements de leurs banques et de leurs organismes financiers agréés ainsi que les habitudes de leurs publics. Car il est d'évidence que chacun de nos pays associés y trouverait, à des degrés divers sans doute, mais assurés, un avantage dans la compétitivité de leurs prix.
LES PRECISIONS CI-DESSUS ONT PARU NECESSAIRES POUR FAIRE COMPRENDRE QUE LES IMPOSSIBILITES REELLES D'ADOPTER LA TAXE AUTOMATIQUE SUR LES MOUVEMENTS DE FONDS AU DEBUT DES ANNEES SOIXANTE S'ETAIENT RESOLUES TOUTES SEULES LES UNES APRES LES AUTRES AU COURS DES DEUX DECENNIES SUIVANTES.
QUE CERTAINS SPECIALISTES DE L'ADMINISTRATION FISCALE AFFIRMENT AUJOURD'HUI ENCORE, QU'ELLE EST CONSIDEREE COMME DEFINITIVEMENT IMPRATICABLE, EST UNE REPONSE MANDARINALE OU DE MAUVAISE FOIS. LES DEUX SANS DOUTE.
LE LECTEUR EN SERA DEFINITIVEMENT CONVAINCU EN PRENANT CONNAISSANCE DES ARCHIVES CI-APRES CONCERNANT LE PROJET "HOMEOPATHIQUE 711.
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Dernière mise à jour le : 04 mars 2006.