Les hypothèses de Mark Purdey sur l’ESB
Les encéphalopathies spongiformes transmissibles (TSE) comprennent de nombreuses maladies neurodégénératives, telles que l’Encéphalopathie Bovine Transmissible (ESB) sur le bétail, la Maladie de Creutzfeldt-Jacob (CJD) et sa variante (vCJD), le Syndrome de Gerstmann Strauler (GSS), et le kuru chez l’homme, la tremblante du mouton, la Chronic Wasting Disease (CWD) chez le daim et l’élan, l’Encéphalopathie Spongiforme Féline (FSE).
Nous pensons que ces TSE sont des maladies dues à plusieurs facteurs, avec une prédisposition génétique, provoquées tout d’abord par une configuration particulière des facteurs environnementaux donnant lieu à des anomalies dans la synthèse de la protéine prion par les cellules du malade. Le sujet atteint rencontre des problèmes dans la maîtrise des interactions produites par des agents oxydants en raison d’une altération de la configuration de cette protéine connue sous le nom de « prion », altération induite par une composition anormale du milieu en oligo-éléments tels le cuivre et le manganèse. Les conditions préalables nécessaire à ces troubles sont : 1) une teneur élevée en manganèse, 2) une teneur très basse en cuivre et en facteurs anti-oxydants, 3) un niveau élevé d’agents oxydants. Il n’y a nul besoin de l’introduction d’un agent « infectieux » pour déclencher la maladie chez l’hôte.
Il est à présent bien reconnu qu’une protéine contenant un métal et désignée sous le nom de prion, que l’on trouve en quantité dans le système nerveux, est sous sa forme anormale le point essentiel de la pathogénie de la maladie. Cette protéine est fabriquée normalement dans la cellule nerveuse à partir d’acides aminés et de 2 ou 3 atomes de cuivre qui se lient à des résidus d’histidine dans la partie de la protéine qui comprend 8 réplications d’un certain peptide. Le prion se localise sur la surface externe de la membrane cellulaire où il est attaché au moyen d’une « ancre » gluco-lipidique durant quelques heures, avant de revenir à l’intérieur des lysosomes de la cellule. C’est là qu’il est détruit pas les enzymes protéolytiques pour donner des acides aminés utilisés dans le recyclage de la protéine.
La protéine prion normale agit comme anti-oxydant -Super Oxyde Dismutase (SOD) - et elle est en bonne position sur la surface cellulaire pour protéger la membrane de la cellule nerveuse contre les dommages causés par les radicaux libres, l’ion Cu agissant comme un « évier » pour les électrons libres. Elle joue également un rôle très important dans le transport du cuivre à l’intérieur et à l’extérieur de la cellule, en procurant le cuivre nécessaire à la transmission de l’influx nerveux au niveau de la synapse. Elle a probablement d’autres rôles que l’on n’a pas encore découvert. Sa fréquence au niveau de la rétine et de la peau donne à penser qu’elle peut avoir une action dans le transfert des électrons et la tolérance à l’énergie lumineuse.
Dans le cas où la teneur en manganèse est élevée et la teneur en cuivre faible, la cellule ne peut pas fabriquer la protéine prion normale à base de cuivre. La protéine se lie alors à des atomes de manganèse à la place du cuivre. A un moment donné du cycle de la protéine, sans doute au niveau de la membrane cellulaire, la protéine se « replie » en une configuration anormale. Nous pensons que cela est dû à un stress oxydatif changeant la valence des atomes de Manganèse. Les prions deviennent alors incapables de jouer leur rôle comme anti-oxydants et transporteurs de cuivre, ce qui aggrave la situation. Dans leur forme anormale, les prions deviennent résistants aux enzymes protéolytiques des lysosomes et ils s’accumulent dans la cellule en la faisant éclater en fin de compte. La protéine anormale forme alors des agrégats, en raison peut-être d’une modification de leur charge électrique, en formant alors les fibrilles riches en métaux caractéristiques des TSE. Ce fait a maintenant été bien démontré dans des cultures de cellules par le Docteur David Brown et ses collaborateurs à l’Université de Cambridge. Pour la première fois, on y a reproduit au laboratoire les lésions caractéristiques de ces maladies en l’absence de tout matériau ‘infectieux ».
Un certain type d’encéphalopathie spongiforme non transmissible (SE) peut être produit par la distribution aux animaux d’un chélate qui rend le cuivre indisponible. C’est ainsi que I.H. Pattison et Al ont établi leur modèle expérimental à la fin des années 1960 et cela est un précédent précoce en faveur de l’idée qu’un processus chimique anormal au niveau des cellules peut provoquer à la longue une maladie à prion chez les animaux. L’étude des milieux où sévissent les TSE montrent des teneurs élevées de manganèse dans l’environnement avec des teneurs faibles en cuivre et en autres anti-oxydants et cela pourrait se retrouver jusqu’à un certain point dans le milieu cellulaire. Récemment Brown a mis en évidence des teneurs en manganèse 10 fois supérieures à la normale dans les tissus cérébraux de personnes décédées de la CJD. Les mécanismes de l’homéostase, liés au génotype des sujets, essayent bien de restaurer l’équilibre, mais cela ne peut pas se produire dans les endroits les plus rétirés de l’organisme et varie d’un animal à un autre. Plus la teneur en manganèse est élevée et plus la fixation par les prions est grande. Avec l’âge, en présence d’agents oxydatifs puissants, les prions commencent à se replier dans une forme anormale, celle que l’on rencontre dans ces maladies.
Ce prion pathologique peut avoir un potentiel pathogénique transmissible, dans certaines circonstances. Mais nous estimons qu’il est secondaire et très rare dans la vie courante. Les études faites sur la transmission du prion pathologique montrent que des animaux à qui on a inoculé par voie intracérébrale ou intraveineuse ( par ingtestion aussi) des homogénéisats de cervelle peuvent « infecter » des animaux expérimentalement. Mais ces méthodes sont très agressives pour le sujet en expérience, ni les animaux, ni les humains n’ingèrent d’homogénéisats... L’homogénéisation provoque une altération du tissu cérébral et sépare la partie protidique liée au métal du reste de la protéine prion; Sous cette forme nouvelle, cela permet aux métaux d’avoir une capacité accrue de provoquer des stress oxydatifs et de générer des radicaux libres très toxiques. Qui plus est, le matériau est souvent utilisé après concentration. Ces méthodes ne peuvent pas être considérées comme une preuve de la possibilité d’infection in vivo par voie orale, surtout dans cette maladie où les radicaux libres et les cathions bivalents jouent un rôle aussi central.
Cette éventualité doit cependant retenir toute notre attention en raison de la possibilité de transmission par transfusion sanguine, puisque nombre de cellules sanguines ont la faculté de fabriquer du prion et qu’il n’y a pas de protection particulière liée à « une barrière » des espèces. Si le prion d’une cellule sanguine de la lignée blanche s’est transformé en prion pathologique, il pourrait transmettre le CJD. Pour cette raison, on pratique en Angleterre la leuco-déplétion des stocks de sang nécessaires aux transfusions. Il semble possible que la capacité « d’infectivité » soit contenue dans les « grumeaux » de plaques protéiques riches en métaux réactifs comme le manganèse et le fer. Ce potentiel neurotoxique réside dans la capacité de donner le coup d’envoi à une voie spécifique léthale impliquant des radicaux libres, le prion normal devenant incapable de réaliser son rôle physiologique de transfert d’électrons dans la cellule. En définitive, le prion mutant agit comme un puissant « pro-oxydant » qui agit pour son propre compte et conduit, au travers de la production d’électrons en excès, à la production de quantités importantes de « sous-produits », tels les radicaux oxhydriques, le peroxyde d’hydrogène, le peroxyde d’azote ou les quinones qui en fin de compte détruisent les neurones. C’est un mécanisme comparable à celui que l’on rencontre dans une « maladie-soeur », la maladie d’Alzeimer.
La théorie communément admise n’est pas très explicite et je ne suis pas capable de l’exposer clairement avec les références nécessaires. Notre Ministère de l’Agriculture et des Forêts (MAFF) parle bien d’un prion anormal d’origine ovine, qui se serait retrouvé dans la farine de viande osseuse (FVO) comme cause de l’ESB. Mais il y a une grande quantité de preuves contre cette hypothèse. On a dépensé en 16 ans 140 millions de livres ( = 140 milliards de francs lourds ! ) pour le prouver et on n’arrive pas encore à démontrer les postulats de Koch quant à cette dernière hypothèse.
En résumé : - Les FVO données en nourriture à des animaux d »expérience ne provoquent pas de TSE, ni d’ailleurs aucune autre maladie.
- Des milliers de tonnes de FVO exportées à l’étranger à de nombreux pays, alors même que leur teneur en prion anormal (PrPsc) était à son maximum, n’ont pas provoqué l’apparition d’ESB dans ces pays.
- - La présence du PrPsc dans les FVO a été drastiquement réduite (virtuellement réduite à zéro) au cours des 14 dernières années, et pourtant l’ESB apparaît et se développe, avec une tendance à l’augmentation, dans nombre de pays, comme l’Irlande, le Portugal, l’Espagne, la France, la Belgique, les Pays-Bas, la Suisse, l’Allemagne. Si la théorie officielle était correcte, on devrait s’attendre à une concordance entre l’augmentation et la diminution de la teneur en PrPsc dans les FVO et l’ESB.
- - Aucune souche de tremblante inoculée dans le crâne de bovins n’a produit l’ESB.
- - Les FVO contenant des cadavres de moutons atteints de tremblante ont été ajoutés dans les aliments des bovins depuis les années 1850 (avant même que les traitements modernes n’aient été introduits) sans produire de maladie. Le bétail et les moutons ont toujours pâturé ensemble les mêmes prairies. Par conséquent, on peut dire que les bovins ont été exposés à l’agent de la tremblante depuis 250 ans sans avoir jamais manifesté le moindre signe d’ESB.
- - Les changements de procédé de traitement des farines de viande invoqués dans le développement de l’ESB (abaissement de la température de traitement et arrêt de l’extraction chimique des graisses) ont été mis en place dans de nombreux pays sans provoquer l’apparition de l’ESB (en Suède et en Norvège par exemple).
- - Le SEAC m’a confirmé qu’en réalité la température de traitement n’avait pas été abaissée dans la pratique (138° centigrades en réalité). D’ailleurs un abaissement de la température ne serait pas la cause de la maladie, le prion pouvant résister à la température d’incinération de 1.000° C. Les essais d’inactivation du prion par l’extraction à l’acétone se sont révélés négatifs. Néanmoins, cet arrêt de l’extraction chimique des graisses a provoqué l’augmentation de la teneur en résidus de pesticides dans les FVO.
- - Aucun animal élevé dans une exploitation BIO depuis sa naissance n’a contracté l’ESB. Pourtant un maximum de 20% de FVO était autorisé dans leur aliment.
De nombreux facteurs sont à incriminer dans le développement de l’ESB
1) Les organophosphates (OPs)
L’épidémiologie de l’ESB montre une forte corrélation entre l’application de doses élevées de l’insecticide systémique phosmet et l’ESB. Un certain nombre de mécanismes d’action ont été proposés pour expliquer ce phénomène. Cinq ans avant l’apparition du premier cas d’ESB en Grande-Bretagne, l’application d’une dose élévée du pesticide organophosphoré dithiophosphate phosmet (4 fois la dose maximum préconisée par le fabriquant ) en solution lipidique est devenue obligatoire pour l’éradication du varron (warble fly). Le produit en question était appliqué le long de la colonne vertébrale des animaux, à quelques millimètres de la moelle épinière. Ce traitement était appliqué deux fois dans l’année, avec un suivi volontaire à deux fois la dose préconisée par le fabriquant. Dans le même temps, le changement dans la technique de traitement des FVO a amené une augmentation de ces FVO en phosmet et autres pesticides. A la même époque également, le phosmet à double dose a été préconisé pour le contrôle des poux.
Premièrement, les deux molécules de soufre du di-thiophosphate de ce type d’organophosphorés se lient avec les atomes de cuivre pour former un anneau mercaptide, abaissant par là même la teneur en cuivre des cellules. Ceci est comparable à ce qui se passe dans les encéphalopathies induites par un chélateur du cuivre, la cuprizone.
Deuxièmement, dans son action, le phosmet même à dose aussi faible que 2 ppm accélère (jusqu’à 10 fois) la production du prion, et quel qu’ait été le détonateur, cette propriété a augmenté la production du prion pathologique. Cette diminution du temps d’incubation pourrait à elle seule rendre compte du caractère épidémique de la maladie. Cette augmentation de production du prion pourrait aussi expliquer l’accroissement du nombre de sites moléculaires capables de se lier au cuivre, réduisant du même coup la teneur en cuivre disponible dans les cellules. La protéine prion doit alors se lier à un métal de deuxième choix, sur ces sites libres et cela la rend capable de se replier.
Troisièmement, le potentiel oxydatif du phosmet pourrait oxyder le prion lié au manganèse sur la surface des cellules en l’oxydant en Mn3+ ou Mn4+ bloquant ainsi la conformation pathologique, ce qui en retour rend ces sites réfractaires à la dégradation enzymatique.
D’autres OPs qui ne bloquent pas le cuivre posent moins de problèmes en termes de risques. Mais ils agissent comme agents oxydants et le risque est le plus grand avec l’augmentation de la dose appliquée près des yeux, du tissu cérébral et de la moelle épinière.
En France, on constate un phénomène comparable au moment on s’est mis à mettre en place des campagnes d’éradication du varron.On y utilise le phosmet dans une préparation huileuse et l’Ivermectine. Le Professeur Michel Bounias a fait l’étude de cette intervention et il a trouvé une forte corrélation statistique entre cette campagne et l’apparition de l’ESB en France.Le Royaume Uni a exporté de la FVO en France, entre 1988 et 1990 et si ces importations étaient à blamer, on aurait dû constater une apparition de l’épidémie vers 1992 et une réduction dès 1995. Ce qui n’est pas le cas. Au contraire on assiste à une augmentation continue qui pourrait se traduire par un nombre de cas compris entre 1.200 et 7.000.
Le phosmet peut-il causer une encéphalopathie spongiforme ? Voilà une question qui intrigue et à laquelle il n’est pas possible de donner une réponse certaine dès à présent. Mon opinion est que cela est possible chez la vache, si la teneur en manganèse est relativement élevée, peut-être même dans la partie supérieure des normes communément admises. Des recherches complémentaires devraient éclaircir ce phénomène. Whatley et Al ont montré que le phosmet provoquait 4 des 5 changements indispensables au déclenchement des TSE. La résistance aux protéinases n’a pas été démontrée clairement dans ces tests, mais cela peut être dû au fait qu’il n’y avait pas de Mn dans la culture de cellule. Le taux de cuivre était normal.
De nombreuses sources procurant des doses plus importantes de manganèse ont pu affecter les animaux au début des années 1980. La FVO en contenait des résidus importants dus à l’ajoût de fumier de poules. Des suppléments de manganèse existaient aussi sous forme de pierres à lécher et de poudres mis à disposition dans les auges. L’utilisation de pesticides contenant du manganèse comme le Maneb et le Mancozeb est aussi accrue à cette époque. La teneur de l’herbe en manganèse est naturellement plus élevée dans de nombreuses régions où a sévi l’ESB. Il paraît vraisemblable que l’excès de manganèse a pu se lier aux sites du prion manquant de cuivre en raison d’une carence en cuivre au niveau cellulaire.
Il y a aussi la possibilité que le manganèse, sous forme d’oxyde ou de silicate , puisse être incriminé. L’oxyde de manganèse se présente souvent dans l’environnement sous forme de nodules très concentrés en ces éléments. L’étude approfondie d’une ferme du Devon a révélé que les minéraux avaient des teneurs élevées en Mn avec pratiquement pas de cuivre. Dans ces nodules, on a également trouvé des métaux très réactifs comme l’aluminium et le fer. Cette zone se trouve dans la « scrapie-belt » dans le North-Devon et le Somerset. Le Mn est aussi suspecté d’exister (très rarement) dans la nature sous sa forme la plus oxydée et la plus toxique, sous forme de minéraux au pyrixène (Mn4).
Une autre étude intéressante a révélé des teneurs très élevées en Angleterre dans la couche supérieure de sable d’une usine de traitement des eaux à Grampian. Ces oxydes retenaient la plupart des autres métaux que l’on filtrait avec l’eau. Lors d’un voyage au Colorado, Mark Purdey a trouvé un noyau de cas de CWD n’atteignant que les daims buvant l’eau d’une chute issue d’une usine de traitement.
3) Le stress oxydatif (OS)
Si une celule ne peut se débarasser d’un OS, résultant d’une action d’un déclencheur et aboutissant à une protéine mal « pliée », la nature du Mn que fixe le prion peut être un des atomes de Mn les plus réactifs, du type le plus oxydé comme le Mn3+ et le Mn4+ ou même le Mn7+.
Alternativement, l’oxydation peut se produire sur le prion qui se trouve au niveau de la membrane cellulaire s’étant lié à du Mn2+, en perdant ainsi des électrons à l’origine d’un pliage de la région distale de la protéine. Les sources habituelles de stress oxydatif sont les pesticides et les rayons ultra-violets.
Quand le prion anormal du bétail s’est retrouvé dans les FVO, cela a pu amplifier la maladie, si ce prion a pu passer à travers une paroi intestinale qui « fuit » (leaky), pour gagner le courant sanguin ou la lymphe à travers une interface de la paroi intestinale telle que les plaques de Peyer.
Le nouveau variant (nCJD)
Nous pensons que cette maladie est due à l’existence des mêmes facteurs que ceux à l’origine de l’ESB, c’est-à-dire une source de manganèse réactive, une faible teneur en cuivre et un accroissement du stress oxydatif due vraisemblablement à l’action des pesticides ou de la lumière ultra-violette. Le fait que l’ESB et le vCJD présentent un tableau clinique similaire n’est pas la preuve qu’il y ait une relation de cause à effet entre l’ESB et le VCJD. Quand on est est présence de l’empoisonnement d’une vache par le plomb, ainsi que celui de l’éleveur, cela ne prouve pas que la vache a transmis la pathologie de l’intoxication à l’éleveur ou vice-versa, mais qu’ils pourraient avoir été exposés à la même cause.
L’épidémiologie de la CJD et celle de la vCJD suggérent fortement que des facteurs environnementaux aient eu une action sur les victimes, car nombre de cas sont très voisins les uns des autres, à deux cents mètres de distance. Le prion anormal pathologique doit avoir été si fréquent à la fin des années 1980 dans une grande variété d’aliments conditionnés consommés dans tout le Royaume-Uni que pratiquement toute la population a dû être exposée; Il est donc très difficile de comprendre pourquoi cette prétendue « infectivité » si répandue puisse se concentrer en certains endroits topographiques précis. C’est le cas par exemple à Queniborough, près de Leicester, il y a eu un cas de CJD classique (sporadique), il y a 12 ans et deux cas récents de vCJD dans la même rue, 3 autre cas dans la même région et un cas d’encéphalite spongiforme féline.
Nous avons trouvé dans cette région des teneurs élevées en manganèse, de l’épandage des effluents de traitement des eaux, contenant des teneurs élevées en métaux réactifs (Mn,zinc, cadmium). Nous avons également noté qu’un dépot de munitions avait été aménagé dans les années 1950 impliquant une grande quantité de terrassements. Ainsi que des épisodes de pollution dus à une ancienne teinturerie, fermée à présent, sur la zone industrielle (nombreuses constatations de l’émission de poussière et de sable contaminés par des couleurs à base de Mn pendant une longue période).
Un autre groupe (cluster) a été constaté à Armthorpe (East Doncaster), un vieux village minier dont la teneur en Mn des sols est très élevéé. Il y a été relevé 3 cas dans la même rue. Tout près, j’y ai découvert une usine de traitement des eaux et des terrassements importants pour la construction de routes et d’une zone industrielle. Il planait dans l’air une poussière qui pénétra dans mes yeux et ma gorge. J’ai pris des échantillons du sol arable et dans les excavations : la teneur en Mn au niveau de ces dernière était le double de celle du sol arable
A Ashwood, Manchester Sud, on a relevé 2 cas à 200 mètres l’un de l’autre.
Un nombre importants des premiers cas d’ESB et de vCJD se sont produits dans une bande de terrain très peu peuplée dans le centre du Kent. Les premiers cas d’ESB se sont produits à la ferme du Manoir de Plurenden, et deux cas de vCJD se sont produits à High Halden et à Bethersden, à moins de un mile de la ferme. Deux incidents de pollution industrielle dans cette zones sont intéressants à relever : l’une à Smarden, impliquant une usine de production d’organo-phosphorés contaminant les champs environnants, et une autre à l’usine chimique d’ICI à Yalding en avril 1986. Noter aussi que les pesticides sont très utilisés dans cette zone que l’on a baptisée « Le Jardin de l’Angleterre ».
On connaît diverses mutations du gène qui encode pour la protéine prion, et ceux-ci ont une influence sur l’installation et la pathologie de la maladie. Le Gerstmann Straussler Syndrome (GSS) est une maladie génétique due au prion fatale pour ceux porteurs du gène. La plupart des autres mutations associées ne donnent pas nécessairement une maladie mortelle.
L’an dernier, nous avons étudié la fréquence très élevée d’une CJD sévissant dans un petit village du Sud de l’Italie, parmi la population grecque. L’affection débuta dans les années 1990. Toutes les victimes portaient une mutation génétique (E 200K). Il n’y eut aucun autre cas chez les Grecs dispersés dans une vaste zone de l’Italie. Les études préliminaires ont montré le sol contenaient des teneurs élevées en Mn, de faibles teneurs en Cu, l’utilisation de thiophosphates sur les bergamotes, une industrie (teinturerie) présentant des risques pour la CJD. Cette situation suggère bien l’existence d’un facteur déclenchant.
Nous pensons que la génétique est impliquée au delà du seul gène codant pour le prion, parce qu’une expression mauvaise ou altérée des gènes codant pour nombre d’enzymes ou de métallo-protéine serait un facteur aggravant du risque de contracter ces maladies.
Notre hypothèse est basée sur plusieurs études environnementales complétées par des analyses de laboratoire; sur de la recherche en culture de cellules; sur des analyses épidémiologiques et une revue très large de la littérature scientifique. La plus grande partie est hors d’un doute raisonnable, mais certains faits doivent être précisés et confirmés par d’autres laboratoires. Il est évident qu’il reste beaucoup à faire. Nous croyons que nous devrions identifier et étudier certains facteurs de risque. Avec le temps, nul doute que beaucoup d’entre eux ne se muent en merles blancs (red herrings), mais au point où nous en sommes, nous devons travailler sur toutes les hypothèses pour découvrir la vérité. Il faut aussi être prêt à s’adapter et à jeter par dessus bord toute idée qui ne résiste pas à un examen scientifique sérieux.
Nous sommes loin d’avoir toutes les réponses, ce qui n’est pas surprenant étant donné que ces maladies telles que la maladie d’Alzeimer sont des affections complexes, multifactorielles. Mais les travaux expérimentaux basés sur l’utilisation des « homogénéisats », qui ont démontré un risque théorique potentiel, ont trompé les chercheurs, en concentrant leur intérêt trop tôt sur le « premier suspect » et on dirait qu’ils vont continuer à le chasser jusqu’à ce que les vaches reviennent au pays.
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Dernière mise à jour le : 04 mars 2006.