LA POUPEE ET LA RELIGIEUSE
Il était une fois un notaire gascon qui « possédait » une fort belle épouse. Un corps bien proportionné, sans doute, mais qui plus est, loin d’être négligeable, un regard, pourtant naturel qui sans provoquer le vôtre, vous laissait entrevoir le septième ciel. Des yeux perçants comme des vrilles, sans insolence, flamboyants comme des braises propres à allumer un incendie que tous les pompiers du monde auraient toutes les peines à éteindre.
Ami de ce notaire, bien qu’il détestât, à peu près tous les gens de robe, un jeune vieux beau, encore leste et vert, poète plein d’imagination, portait à ce couple une tendresse sans égale.
Un jour, alors que notaire et poète devisaient paisiblement au coin de la cheminée, ce brave confident, régent consciencieux d’affaires familiales, prit a parti son ami et lui tint à peu près ce langage :
-- « L’affection dont tu nous entoures me touche énormément, mais serait-il gênant que de te demander jusqu’où pourraient aller les sentiments que tu portes à ma compagne ? ».
Sans aucune gêne, l’habile conteur lui répondit le plus sincèrement du monde :
-- « Figures-toi mon ami que je sois devant une vitrine de pâtissier occupé à lorgner de splendides religieuses préparées par un divin maître « es-pâtes ». Je me complairais, à l’extrême, à les regarder laissant à mes yeux, seuls, l’extase de la contemplation. S’il devait advenir que mes sens puissent atteindre mes fantasmes voilà ce que je ferais. J’entrerais dans la boutique, saluerais courtoisement le professionnel et lui demanderais de me préparer ces divines religieuses. Or, dans le cas qui nous préoccupe, tu sais aussi bien que moi qu’il n’y a qu’une religieuse. Lorsqu’enfin tu comprendras, qu’il ne pouvait que m’être répondu que les religieuses étaient depuis belles lurettes vendues, tu sauras que je ne suis pas homme à enlever une quelconque pâtisserie par la force, sauf, bien entendu, celle qui n’a pas trouvé preneur ».
Le notaire hocha pensivement la tête, releva cette dernière pour regarder avec respect et considération cet ami original certes, mais digne d’être aimé.
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Dernière mise à jour le : 04 mars 2006.