CONTE DE LA PATATEINTERET N' EST PAS COMPTE"Si d'aventure, la farine venait à manquer ce n'est ni l'or, ni la monnaie qui produiraient le miracle de la multiplication ".
Introduction
Les banquiers en riront, sans doute, mais à leurs réflexions, après conte lu, il ne serait pas étonnant qu'ils finissent par en rire jaune.
Pièce contée en un seul acte
Un agriculteur, modeste mais besogneux en dehors du système, vint un jour trouver son banquier Armand Saprophyte — juste au moment où la nature se réveille plongée depuis de longs mois dans une salutaire torpeur — et lui tint à peu près ce discours :
- << Mon bon usurier, auriez-vous l'extrême obligeance de me prêter un peu d'argent afin que je puisse acheter de la semence de pommes - de – terre ? L'année passée n'ayant pas été propice à des récoltes abondantes nous n 'avons pu mettre de côté la quantité de semences nécessaires >>.
L'usurier dévisagea son interlocuteur, fit une moue significative, au point que l'agriculteur n'insista pas davantage. Le jeu, le banquier le considérait de la sorte, n'en valait pas la chandelle; prêter pour de vulgaires tubercules ! Le banquier ne connaissait pas la véritable valeur de ces plants pourtant si délectables sous forme de frites. Ces racines protestantes, Belge de surcroît, aurait pu l'inciter à plus d' écoute.
Le fermier en désespoir de causes alla trouver l'un de ses compagnons de peine, agriculteur avisé, et tout aussi calculateur que l'usurier.
Le langage fut quasi identique. Il désirait obtenir 1.000 kilos de semences et non des écus.
Son voisin d'infortune vit venir son compère. Il venait de terminer sa plantation, et malgré l'appétit de ses vastes terres et des bouches qu'il nourrissait plus de 1.500 kilos restaient sur le carreau de la cave. Il ne pouvait pas refuser d'autant que souvent les mouches peuvent changer d'ânes; il se devait au service, une obligation calculée.
- << Mon cher ami, sache que j'ai bien ces patates mais tu sais très bien que tu ne peux qu'en passer par mes exigences car mes caves sont pleines et les tiennes sont vides ! Ainsi, je te les confies mais en retour tu me donneras, lors de ta récolte l'équivalent augmenté de 300 kilos.
Sans se départir de son calme, l'emprunteur répondit à son confrère qu'il serait obligé d'en passer par les exigences du prêteur mais qu'il saurait s'en souvenir.
- << J'ajoute, lui dit-il que tu es vraiment exigeant et que tu dépasses les limites du raisonnable. Pourquoi ? me rétorqueras – tu ! Pour les simples et bonnes raisons suivantes : tu me prêtes de vieilles patates et au bout de trois mois je te rends des patates " neuves" d'une part et de l'autre tu sais très bien que les rats auraient pu se charger de tes réserves si je ne te les empruntais pas. Autant qu'elles aillent en location et qu'elles fassent peau neuve ! >> .
L'homme avait parlé avec sagesse et simplicité. Ils finirent par conclure que l'amitié, les services réciproques rendus et à se rendre n'avaient aucun prix. Les mille kilos furent cédés sans autre forme de discussion marchande.
Dans les trois mois qui suivirent la parcelle plantée bénéficia des faveurs de la nature. La récolte fut phénoménale. Les patates étaient bien en chair, fondantes à la bouche une fois cuites, moelleuses lorsqu' elles accompagnaient les viandes sous forme de frites.
Hélas, la nature si généreuse à l'endroit de ce site agricole se déchaîna durant la même période tout autour du lieu protégé jusqu'à vingt lieues à la ronde.
La récolte atteint une cote au – delà des prévisions. Cette cote dépassa largement toutes les espérances de l'agriculteur. Son créditeur à trois lieues de son domaine apprécia ce rapport exceptionnel et ne regretta pas d'avoir compris la sagesse et l'intuition de son collègue.
Il y eut crise de la patate. On ne la trouvait que rarement sur les marchés. Se comptaient sur les doigts de la main les exploitants à la posséder en quantité. Les plus gourmets faisaient le siège des fermes privilégiées.
Le banquier Armand, finement nanti d'un palais de chair et non de zinc, céda à ses multiples tentations. Un soir de septembre, il vint rendre visite à notre agriculteur auquel il avait refusé un prêt sur l'achat de ses tubercules.
Sans rancune l'heureux exploitant, lui remplit son sac, refusa le paiement et l'histoire se termine par la morale du philosophe paysan à l'adresse de ce vilain damné banquier.
- << L'or, n'est rien cher ami, vous venez d'en prendre conscience. Il n'est porté au pinacle que parce qu'il est rare et que trop de personnes lui portent intérêt. Les règles du jeu sont faussées, par cet amour immodéré pour cette matière et l'instinct grégaire des hommes qui répètent et agissent comme de vulgaires perroquets >>. Il n'est qu'un moyen commode de transactions pour écouler toute production.
Si nous étions entrés en véritable période de pénurie vous auriez tout simplement été obligé de manger vos écus pour satisfaire votre faim et vous seriez devenu "doryphage" !
D'autre part, sachez que si vous êtes trop souvent en position de supériorité c'est bien parce que les produits de la terre se fanent, flétrissent, moisissent … bref perdent de leur valeur alors que l'or ne s'oxyde point. Que la monnaie perde de sa valeur, tout autant que se déprécie notre monde organique, et les échanges seront plus équitables. Justice sera alors rendue à ceux qui sont tributaires des caprices de la nature alors qu'antan, tout autant qu'hier, vous vous frottiez les mains en lorgnant sur nos propriétés >> . On comprend alors aisément pourquoi les terres agricoles sont souvent possédées par ceux qui manient l'argent.
DIEGO DER
N- B – Un prêt avantage inconsidérément le créditeur. Il lui permet, quoiqu'il puisse arriver, de récupérer les billes cédées et …les petites billes correspondantes aux intérêts.
Lorsqu' il survient des aléas naturels, ( mauvaise récolte, naufrage, trop d'invendus ) et que les sommes investies ne sont plus qu'un souvenir douloureux il serait logique que ces avatars — indépendants de la volonté et du travail de l'emprunteur — soient partagés et puissent annuler l'intérêt de la dette.
L'emprunteur prenant tout autant de risques, sinon davantage, il serait normal que le prêteur soit lié à ses derniers avec un partage fifty – fifty des sommes perdues. Mais en créance le prêteur a toujours été avantagé parce que des malins ont créés des règles léonines.
Diégo Der
CONTE DE LA PATATE
Le site :
Accueil | Notre charte | Sommaire général | Livres | Liens | Forum | Contactez-nous | Plan du site
Pour toute question ou problème concernant ce site Web, envoyez un courrier électronique à Jacques Daudon. © 2005
Dernière mise à jour le : 05 AVRIL 2010