VINGT-CINQ ANS D'INCOMPREHENSION ET D'ERREURS
Le dérapage de notre économie a commencé en 1967 lentement, insidieusement, pour s'accélérer insensiblement jusqu'à l'acceptation de l'inflation présentée à tous les Français comme la méthode infaillible de l'enrichissement.
De prétendus " experts " nous ont alors assurés que l'inflation était " le stimulant le plus énergique de la croissance " et qu'elle était " nécessaire au développement d'une économie de plein emploi dans une société libre ". Les quelques clairvoyants qui criaient casse-cou ne furent pas entendus dans l'agitation d'une spéculation généralisée et de 1967 à 1973, le taux s'est sournoisement multiplié par 2,8.
Il a fallu qu'elle atteigne les 12 à 13 % l'an, avec des taux usuraires à 36% pour que l'on s'aperçoive enfin de ses conséquences désastreuses : la régression de la compétitivité de nos produits et la destruction progressive de notre industrie avec le chômage pour corollaire.
On tenta d'y porter remède par une série de dévaluations obstinées que l'on croyait compétitives. Elles échouèrent toutes, les unes après les autres, faute d'avoir été accompagnées ou précédées de réformes remédiant aux défaillances structurelles de l'économie dont personne ne tenait compte.
Si la valeur d'une monnaie reflète la puissance d'une économie, ce n'est pas la faute de la monnaie quand l'économie d'un pays s'effondre : les causes en sont spécifiquement économiques et non monétaires.
La dévaluation compétitive ne réussit que si la véritable cause de la défaillance est supprimée, surtout si cette cause est structurelle, c'est à dire permanente.
Il ne suffit pas de modifier la graduation d'un thermomètre pour remédier à la fièvre ou à la sous température. Nos économistes qui l'ignorent n'ont aucune excuse. Depuis 1928 nous avons procédé à vingt-deux dévaluations. Les six dernières : 79, 81, 82, 83, 86, 87, ont été particulièrement significatives. Elles n'ont en rien amélioré notre compétitivité parce qu'elles n'avaient aucune influence sur le mal qui rongeait déjà chaque jour nos structures économiques : le cancer fiscal.
Ne pas avoir tenu compte de la répétition de ces échecs ne témoigne pas du réalisme politique de nos "experts".
Il est incontestable que Sisyphe faisait preuve d'une remarquable obstination, mais certes pas de génie technique. Le simple fait que la République Fédérale Allemande de 71 à 83, réévalua 9 fois le deutsche mark sans compromettre sa prééminence économique n'a pas fait réfléchir nos politiques.
Quand cesseront-ils de ressasser les formules scolaires usagées et feront-ils un effort d'imagination pour adapter les techniques à la réalité ?
Aucun de nos économistes de profession ne s'est aperçu que la courbe des prix à la consommation et celle du chômage étaient parallèles à celles des prélèvements fiscaux, dits obligatoires, qui s'imputent de plus en plus lourdement sur les entreprises dès la formation de leurs prix de revient.
On s'obstine à soigner le mal qui va s'aggravant avec les médecines traditionnelles, subventions à fonds perdus, compression des salaires, augmentation des emplois administratifs et des services publics, accentuation continue de la pression fiscale. Toutes mesures contre-indiquées qui augmentent les prix, diminuent le pouvoir d'achat, réduisent la consommation, aggravent les déficits et le chômage, multiplient les faillites.
Des écervelés en vinrent à proposer " l'impôt récession " !! Des hurluberlus, en application d'une arithmétique élémentaire, s'acharnent à réduire le chômage en le partageant : réduction du temps de travail à 35 heures par semaine, voire 32 heures. Or, depuis 1960 le temps de travail a diminué de 33%. Cela n'a pas empêché le chômage de se développer. Durée hebdomadaire réduite de 48 heures à 39, quatrième et cinquième semaine de congés payés, retraite à 60 ans, au lieu de 65 ans et préretraite — chômage de luxe — à 55 ans. Dans le même temps le chômage s'est multiplié par 28 !!!
Le résultat le plus évident sera une augmentation de 11% des charges des entreprises. La constance de cette politique perverse n'a que des effets néfastes sur l'économie et le chômage.
On ne peut pas trouver la bonne solution en raisonnant à l'envers :
- un pays n'a de monnaie forte que grâce à une économie puissante,
- on ne peut maintenir une politique sociale d'avant-garde dans une économie qui s'effondre,
- il n'y a pas de traitement spécifique du chômage; on ne peut le réduire qu'en relançant les activités économiques,
- on ne crée pas des emplois en surchargeant les entreprises à la limite de la rentabilité, d'impôts, de taxes et d'obligations diverses,
- les succès financiers de quelques grands groupes bancaires, industriels ou commerciaux et leurs unions, concentrations capitalistes que Marx avait prévues, n'assurent en rien le développement des populations, bien au contraire. Leur systémisation aboutirait, si on laissait faire, aux mêmes catastrophes que le communisme. Qui peut prétendre qu'elles sont une manifestation du libéralisme?
Force est de constater que dans ce pays, les " experts " sont incapables d'observer les faits. Nous assistons à l'échec continu des bons élèves qui interposent leurs manuels scolaires abstraits entre eux et les réalités.
Aucun des remèdes employés jusqu'ici n'a enrayé notre effondrement. La plupart l'ont accéléré. La raison en est qu'aucun ne s'attaque à la cause du mal.
Aussi faut-il rappeler les principes : la médecine ne soigne pas la fièvre mais sa cause. En règle générale on ne domine le réel qu'en y adaptant " l'outil ". On ne saurait combler le gouffre qui s'étend devant nous en utilisant les méthodes avec lesquelles on l'a creusé.
Mieux vaut ne pas continuer à soigner notre anémie économique avec les saignées et les clystères de nos Purgon et Diafoirus contemporains.
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Dernière mise à jour le : 04 mars 2006.